splash screen icon Lenndi
splash screen name leendi

Les poésies les plus envoûtantes vous attendent...

Ne manquez plus jamais d'inspiration avec les poésies originales. Partagez l'émotion et la beauté des vers avec ceux qui vous entourent.

Poésies+7 000

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren

@emileVerhaeren

Il fait novembre en mon âme Rayures d'eau, longues feuilles couleur de brique, Par mes plaines d'éternité comme il en tombe ! Et de la pluie et de la pluie - et la réplique D'un gros vent boursouflé qui gonfle et qui se bombe Et qui tombe, rayé de pluie en de la pluie.

en cours de vérification

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren

@emileVerhaeren

J'ai cru a tout jamais notre joie engourdie J'ai cru à tout jamais notre joie engourdie Comme un soleil fané avant qu'il ne fût nuit, Le jour qu'avec ses bras de plomb, la maladie M'a lourdement traîné vers son fauteuil d'ennui. Les fleurs et le jardin m'étaient crainte ou fallace ; Mes yeux souffraient à voir flamber les midis blancs, Et mes deux mains, mes mains, semblaient déjà trop lasses Pour retenir captif notre bonheur tremblant. Mes désirs n'étaient plus que des plantes mauvaises, Ils se mordaient entre eux comme au vent les chardons, Je me sentais le coeur à la fois glace et braise Et tout à coup aride et rebelle aux pardons. Mais tu me dis le mot qui bellement console Sans le chercher ailleurs que dans l'immense amour ; Et je vivais avec le feu, de ta parole Et m'y chauffais, la nuit, jusqu'au lever du jour. L'homme diminué que je me sentais être, Pour moi-même et pour tous, n'existait pas pour toi ; Tu me cueillais des fleurs au bord de la fenêtre, Et je croyais en la santé, avec ta foi. Et tu me rapportais, dans les plis de ta robe, L'air vivace, le vent des champs et des forêts, Et les parfums du soir ou les odeurs de l'aube, Et le soleil, en tes baisers profonds et frais.

en cours de vérification

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren

@emileVerhaeren

Je dédie a tes pleurs, a ton sourire Je dédie à tes pleurs, à ton sourire, Mes plus douces pensées, Celles que je te dis, celles aussi Qui demeurent imprécisées Et trop profondes pour les dire. Je dédie à tes pleurs, à ton sourire, A toute ton âme, mon âme, Avec ses pleurs et ses sourires Et son baiser. Vois-tu, l'aube blanchit le sol, couleur de lie ; Des liens d'ombre semblent glisser Je dédie à tes pleurs, à ton sourire, Mes plus douces pensées, Celles que je te dis, celles aussi Qui demeurent imprécisées Et trop profondes pour les dire. Je dédie à tes pleurs, à ton sourire, A toute ton âme, mon âme, Avec ses pleurs et ses sourires Et son baiser. Vois-tu, l'aube blanchit le sol, couleur de lie ; Des liens d'ombre semblent glisser Et s'en aller, avec mélancolie ; L'eau des étangs s'éclaire et tamise son bruit, L'herbe rayonne et les corolles se déplient, Et les bois d'or s'affranchissent de toute nuit. Oh ! dis, pouvoir, un jour, Entrer ainsi dans la pleine lumière ; Oh ! dis, pouvoir, un jour, Avec des cris vainqueurs et de hautes prières, Sans plus aucun voile sur nous, Sans plus aucun remords en nous, Oh ! dis, pouvoir un jour Entrer à deux dans le lucide amour !...

en cours de vérification

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren

@emileVerhaeren

Je t'apporte ma joie Je t'apporte, ce soir, comme offrande, ma joie D'avoir plongé mon corps dans l'or et dans la soie Du vent joyeux et franc et du soleil superbe ; Mes pieds sont clairs d'avoir marché parmi les herbes, Mes mains douces d'avoir touché le coeur des fleurs, Mes yeux brillants d'avoir soudain senti les pleurs Naître, sourdre et monter, autour de mes prunelles, Devant la terre en fête et sa force éternelle. L'espace entre ses bras de bougeante clarté, Ivre et fervent et sanglotant, m'a emporté, Et j'ai passé je ne sais où, très loin, là-bas, Avec des cris captifs que délivraient mes pas. Je t'apporte la vie et la beauté des plaines ; Respire-les sur moi à franche et bonne haleine, Les origans ont caressé mes doigts, et l'air Et sa lumière et ses parfums sont dans ma chair.

en cours de vérification

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren

@emileVerhaeren

L'ancienne gloire Dans le silence et la grandeur des cathédrales, La cité, riche avait jadis, dressé vers Dieu De merveilleux autels,, tordus comme des feux Cuivres, bronzes, argents, cartels, rinceaux, spirales. Les chefs vainqueurs et leurs soldats Y suspendaient les vieux drapeaux de guerre ; Et les autels décorés d'or, Aux yeux de ceux qui sortaient des combats, Apparaissaient alors Comme un arrière immense de galère. D'entre les hauts piliers, jaillissaient les buccins ; Des archanges farouches Y appuyaient leur bouche Et dans un gonflement de la gorge et des seins Sonnaient vers les vents de la Gloire La vie ardente et la victoire. Sur les marbres des escaliers, Les bras géants des chandeliers Dressaient leurs cires enflammées. Les encensoirs volaient dans les fumées ; Les ex-votos luisaient comme un fourmillement D'yeux et de coeurs, dans l'ombre ; L'orgue, ainsi qu'une marée, immensément Grondait ; des rafales de voix sans nombre Sortaient du temple et résonnaient jusqu'au beffroi Et le prêtre vêtu d'orfroi Au milieu des pennons brandis et des bombardes, Levait l'épée et lentement traçait avec la garde Sur le front des héros, le signe de la croix. Oh ! ces autels pareils à des brasiers sculptés, Avec leur flore énorme et leurs feux tourmentés ; Massifs et violents, exorbitants et fous, Ils demeurent encor, parmi les villes mortes. Debout Alors qu'on n'entend plus les chefs et leurs escortes Sabres, clairons, soleils, lances, drapeaux, tambours, Rentrer par les remparts et passer les faubourgs Et revenir, comme autrefois, au coeur des places, Planter leur étendard dont s'exalta l'espace. La gloire est loin et son miracle : Les Archanges qui couronnent le tabernacle, Comme autant d'énormes Renommées, Ne sonnent plus pour les armées. Avec prudence, on a réfugié L'emblématique et colossal lion, Dans le blason de la cité ; Et, vers midi, le carillon, Avec ses notes lasses Ne laisse plus danser Sur la grand'place Et s'épuiser, Qu'un petit air estropié.

en cours de vérification

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren

@emileVerhaeren

Les saints, les morts, les arbres et le vent Les grand'routes tracent des croix A l'infini, à travers bois ; Les grand'routes tracent des croix lointaines A l'infini, à travers plaines ; Les grand'routes tracent des croix Dans l'espace livide et froid, Où voyagent les vents déchevelés A l'infini, par les allées. Arbres et vents pareils aux pèlerins ; Arbres tristes et fous où l'orage s'accroche, Arbres pareils au défilé de tous les saints, Au défilé de tous les morts Au son des cloches, Arbres qui combattez au Nord Et vents qui déchirez le monde, Oh ! vos luttes et vos sanglots et vos remords Se débattant et s'engouffrant dans les âmes profondes Voici Novembre assis auprès de l'âtre, Avec ses maigres doigts chauffés au feu ; Oh ! tous ces morts, sans feu ni lieu, Oh ! tous ces vents cognant les murs opiniâtres Et repoussés et rejetés Vers l'inconnu, de tous côtés.

en cours de vérification

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren

@emileVerhaeren

Les usines Se regardant avec les yeux cassés de leurs fenêtres Et se mirant dans l'eau de poix et de salpêtre D'un canal droit, marquant sa barre à l'infini, Face à face, le long des quais d'ombre et de nuit, Par à travers les faubourgs lourds Et la misère en pleurs de ces faubourgs, Ronflent terriblement usine et fabriques.

en cours de vérification

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren

@emileVerhaeren

Les vergers de mai En mai, les grands vergers de la Flandre féconde Sont des morceaux de paradis qui se souviennent D'avoir fleuri si blancs, aux premiers temps du monde.

en cours de vérification

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren

@emileVerhaeren

Roses de Juin, vous les plus belles Roses de juin, vous les plus belles, Avec vos cœurs de soleil transpercés ; Roses violentes et tranquilles, et telles Qu'un vol léger d'oiseaux sur les branches posés ; Roses de Juin et de Juillet, droites et neuves, Bouches, baisers qui tout à coup s'émeuvent Ou s'apaisent, au va-et-vient du vent, Caresse d'ombre et d'or, sur le jardin mouvant ; Roses d'ardeur muette et de volonté douce, Roses de volupté en vos gaines de mousse, Vous qui passez les jours du plein été A vous aimer, dans la clarté ; Roses vives, fraîches, magnifiques, toutes nos roses Oh ! que pareils à vous nos multiples désirs, Dans la chère fatigue ou le tremblant plaisir S'entr'aiment, s'exaltent et se reposent !

en cours de vérification

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren

@emileVerhaeren

À la gloire des cieux L'infini tout entier transparaît sous les voiles Que lui tissent les doigts des hivers radieux Et la forêt obscure et profonde des cieux Laisse tomber vers nous son feuillage d'étoiles. La mer ailée, avec ses flots d'ombre et de moire, Parcourt, sous les feux d'or, sa pâle immensité ; La lune est claire et ses rayons diamantés Baignent tranquillement le front des promontoires. S'en vont, là-bas, faisant et défaisant leurs noeuds, Les grands fleuves d'argent, par la nuit translucide ; Et l'on croit voir briller de merveilleux acides Dans la coupe que tend le lac, vers les monts bleus. La lumière, partout, éclate en floraisons Que le rivage fixe ou que le flot balance ; Les îles sont des nids où s'endort le silence, Et des nimbes ardents flottent aux horizons. Tout s'auréole et luit du zénith au nadir. Jadis, ceux qu'exaltaient la foi et ses mystères Apercevaient, dans la nuée autoritaire, La main de Jéhovah passer et resplendir. Mais aujourd'hui les yeux qui voient, scrutent là-haut, Non plus quelque ancien dieu qui s'exile lui-même, Mais l'embroussaillement des merveilleux problèmes Qui nous voilent la force, en son rouge berceau. Ô ces brassins de vie où bout en feux épars A travers l'infini la matière féconde ! Ces flux et ces reflux de mondes vers des mondes, Dans un balancement de toujours à jamais ! Ces tumultes brûlés de vitesse et de bruit Dont nous n'entendons pas rugir la violence Et d'où tombe pourtant ce colossal silence Qui fait la paix, le calme et la beauté des nuits ! Et ces sphères de flamme et d'or, toujours plus loin, Toujours plus haut, de gouffre en gouffre et D'ombre en ombre, Si haut, si loin, que tout calcul défaille et sombre S'il veut saisir leurs nombres fous, entre ses poings ! L'infini tout entier transparaît sous les voiles Que lui tissent les doigts des hivers radieux Et la forêt obscure et profonde des cieux Laisse tomber vers nous son feuillage d'étoiles.

en cours de vérification

Emile Verhaeren

Emile Verhaeren

@emileVerhaeren

À la gloire du vent - Toi qui t'en vas là-bas, Par toutes les routes de la terre, Homme tenace et solitaire, Vers où vas-tu, toi qui t'en vas ? - J'aime le vent, l'air et l'espace ; Et je m'en vais sans savoir où, Avec mon coeur fervent et fou, Dans l'air qui luit et dans le vent qui passe. - Le vent est clair dans le soleil, Le vent est frais sur les maisons, Le vent incline, avec ses bras vermeils, De l'un à l'autre bout des horizons, Les fleurs rouges et les fauves moissons. - Le Sud, l'Ouest, l'Est, le Nord, Avec leurs paumes d'or, Avec leurs poings de glace, Se rejettent le vent qui passe. - Voici qu'il vient des mers de Naple et de Messine Dont le geste des dieux illuminait les flots ; Il a creusé les vieux déserts où se dessinent Les blancs festons de sable autour des verts îlots. Son souffle est fatigué, son haleine timide, L'herbe se courbe à peine aux pentes du fossé ; Il a touché pourtant le front des pyramides Et le grand sphinx l'a vu passer. - La saison change, et lentement le vent s'exhume Vêtu de pluie immense et de loques de brume. - Voici qu'il vient vers nous des horizons blafards, Angleterre, Jersey, Bretagne, Ecosse, Irlande, Où novembre suspend les torpides guirlandes De ses astres noyés, en de pâles brouillards ; Il est parti, le vent sans joie et sans lumière : Comme un aveugle, il erre au loin sur l'océan Et, dès qu'il touche un cap ou qu'il heurte une pierre, L'abîme érige un cri géant. - Printemps, quand tu parais sur les plaines désertes, Le vent froidit et gerce encor ta beauté verte. - Voici qu'il vient des longs pays où luit Moscou, Où le Kremlin et ses dômes en or qui bouge Mirent et rejettent au ciel les soleils rouges ; Le vent se cabre ardent, rugueux, terrible et fou, Mord la steppe, bondit d'Ukraine en Allemagne, Roule sur la bruyère avec un bruit d'airain Et fait pleurer les légendes, sous les montagnes, De grotte en grotte, au long du Rhin. - Le vent, le vent pendant les nuits d'hiver lucides Pâlit les cieux et les lointains comme un acide. - Voici qu'il vient du Pôle où de hauts glaciers blancs Alignent leurs palais de gel et de silence ; Apre, tranquille et continu dans ses élans, Il aiguise les rocs comme un faisceau de lances ; Son vol gagne les Sunds et les Ourals déserts, S'attarde aux fiords des Suèdes et des Norvèges Et secoue, à travers l'immensité des mers, Toutes les plumes de la neige. - D'où que vienne le vent, Il rapporte de ses voyages, A travers l'infini des champs et des villages, On ne sait quoi de sain, de clair et de fervent. Avec ses lèvres d'or frôlant le sol des plaines, Il a baisé la joie et la douleur humaines Partout ; Les beaux orgueils, les vieux espoirs, les désirs fous, Tout ce qui met dans l'âme une attente immortelle, Il l'attisa de ses quatre ailes ; Il porte en lui comme un grand coeur sacré Qui bat, tressaille, exulte ou pleure Et qu'il disperse, au gré des saisons et des heures, Vers les bonheurs brandis ou les deuils ignorés. - Si j'aime, admire et chante avec folie Le vent, Et si j'en bois le vin fluide et vivant Jusqu'à la lie, C'est qu'il grandit mon être entier et c'est qu'avant De s'infiltrer, par mes poumons et par mes pores, Jusques au sang dont vit mon corps, Avec sa force rude ou sa douceur profonde, Immensément il a étreint le monde.

en cours de vérification

É

Éphraïm Mikhaël

@ephraimMikhael

Infidélités Tu parlais de choses anciennes, De riches jardins somnolents Que de nobles musiciennes Troublent, le soir, d’échos dolents; Et de chapelles où s’attardent Les princesses en oraison; Et de lits féodaux que gardent Toutes les bêtes du blason. Hélas! tes paroles amies Pour mon coeur avide et lassé Ont réveillé ces endormies: Les amoureuses du passé. Et chacune à présent se lève Devant moi dans le calme soir, Émergeant à demi du rêve Comme un corps blanc d’un fleuve noir. Oh! les invincibles rivales Que vous-mêmes vous appelez; par ces visions triomphales Nos pâles amours sont troublés. Entre vos seins de soeur clémente Vous caches vainement mon front: C’est vers quelque lointaine amante Que mes désirs cruels iront. Je sais bien, vos yeux d’améthyste S’emplissent de reproches doux... Et je suis mortellement triste De n’avoir plus d’amour pour vous.

en cours de vérification

É

Éphraïm Mikhaël

@ephraimMikhael

Le magasin de jouets Je ne me rappelle plus à présent ni le temps, ni le lieu, ni si c'était en rêve... Des hommes et des femmes allaient et venaient sur une longue promenade triste; j'allais et je venais dans la foule, une foule riche, d'où montaient des parfums de femmes. Et malgré la splendeur douce des fourrures et des velours qui me frôlaient, malgré les rouges sourires des lèvres fraîches, entrevus sous les fines voilettes, un ennui vague me prit de voir ainsi, à ma droite, à ma gauche, défiler lentement les promeneurs monotones. Or, sur un banc, un homme regardait la foule avec d'étranges yeux, et, comme je m'approchais de lui, je l'entendis sangloter. Alors je lui demandai ce qu'il avait à se plaindre ainsi, et, levant vers moi ses grands yeux enfiévrés, celui qui pleurait me dit: « Je suis triste, voyez-vous, parce que depuis bien des jours je suis enfermé ici dans ce Magasin de jouets. Depuis bien des jours et bien des années, je n'ai vu que des Fantoches et je m'ennuie d'être tout seul vivant. Ils sont en bois, mais si merveilleusement façonnés qu'ils se meuvent et parlent comme moi. Pourtant, je le sais, ils ne peuvent que faire toujours les mêmes mouvements et que dire toujours les mêmes paroles. « Ces belles Poupées, vêtues de velours et de fourrures et qui laissent traîner dans l'air, derrière elles, une énamourante odeur d'iris, celles-là sont bien mieux articulées encore. Leurs ressorts sont bien plus délicats que les autres, et, quand on sait les faire jouer, on a l'illusion de la Vie. » Il se tut un moment; puis, avec la voix grave de ceux qui se souviennent: « Autrefois, j'en avais pris une, délicieusement frêle, et je la tenais souvent dans mes bras, le soir. Je lui avais tant dit de choses très douces, que j'avais fini par croire qu'elle les comprenait; et j'avais tant essayé de la réchauffer avec des baisers que je la croyais vivante. Mais j'ai bien vu après qu'elle était aussi, comme les autres, une Poupée pleine de son. « Longtemps j'ai espéré que quelque Fantoche ferait un geste nouveau, dirait une parole que les autres n'eussent point dite. Maintenant, je suis fatigué de leur souffler mes rêves. Je m'ennuie et je voudrais bien m'en aller de ce Magasin de jouets où ils m'ont enfermé. Je vous en supplie, si vous le pouvez, emmenezmoi dehors, dehors, là où il y a des Etres vivants ».

en cours de vérification

É

Éphraïm Mikhaël

@ephraimMikhael

Tristesse de Septembre Quand le vent automnal sonne le deuil des chênes, Je sens en moi, non le regret du clair été, Mais l'ineffable horreur des floraisons prochaines. C'est par l'avril futur que je suis attristé ; Et je plains les forêts puissantes, condamnées A verdir tous les ans pendant l'éternité. Car, depuis des milliers innombrables d'années, Ce sont des blés pareils et de pareilles fleurs, Invariablement écloses et fanées ; Ce sont les mêmes vents susurrants ou hurleurs, La même odeur parmi les herbes reverdies, Et les mêmes baisers et les mêmes douleurs. Maintenant les forêts vont s'endormir, raidies Par les givres, pour leur sommeil de peu d'instants. Puis, sur l'immensité des plaines engourdies, Sur la rigidité blanche des grands étangs, Je verrai reparaître à l'heure convenue - Comme un fantôme impitoyable - le printemps ; Ô les soleils nouveaux ! la saison inconnue !

en cours de vérification

É

Étienne Eggis

@etienneEggis

Ce que c’est qu’un Mari Quand Christophe Colomb eut enfin découvert Ce continent lointain qu’on croyait chimérique, Il mourut loin du sol qu’il avait entr’ouvert, Et Vespuce donna son nom à l’Amérique. Si la femme portait le nom doux et chéri De son premier amant, Anglais, Français ou Russe, Ce serait rarement celui de son mari. — Un mari n’est jamais qu’un Améric Vespuce.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

Aimer est un destin charmant Élégie VIII. Aimer est un destin charmant ; C'est un bonheur qui nous enivre, Et qui produit l'enchantement. Avoir aimé, c'est ne plus vivre, Hélas ! c'est avoir acheté Cette accablante vérité, Que les serments sont un mensonge, Que l'amour trompe tôt ou tard, Que l'innocence n'est qu'un art, Et que le bonheur n'est qu'un songe.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

Au gazon foulé par Éléonore Trône de fleurs, lit de verdure, Gazon planté par les amours, Recevez l'onde fraîche et pure Que ma main vous doit tous les jours. Couronnez-vous d'herbes nouvelles ; Croissez, gazon voluptueux. Qu'à midi, Zéphyre amoureux Vous porte le frais sur ses ailes. Que ces lilas entrelacés Dont la fleur s'arrondit en voûte, Sur vous mollement renversés, Laissent échapper goutte à goutte Les pleurs que l'aurore a versés. Sous les appas de ma maîtresse Ployez toujours avec souplesse, Mais sur le champ relevez-vous ; De notre amoureux badinage Ne gardez point le témoignage ; Vous me feriez trop de jaloux.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

Aux infidèles À vous qui savez être belles, Favorites du dieu d'amour ; À vous, maîtresses infidèles, Qu'on cherche et qu'on fuit tour à tour ; Salut, tendre hommage, heureux jour, Et surtout voluptés nouvelles ! Écoutez. Chacun à l'envi Vous craint, vous adore, et vous gronde ; Pour moi, je vous dis grand merci. Vous seules de ce triste monde Avez l'art d'égayer l'ennui ; Vous seules variez la scène De nos goûts et de nos erreurs : Vous piquez au jeu les acteurs ; Vous agacez les spectateurs Que la nouveauté vous amène ; Le tourbillon qui vous entraîne Vous prête des appas plus doux ; Le lendemain d'un rendez-vous L'amant vous reconnaît à peine ; Tous les yeux sont fixés sur vous, Et n'aperçoivent que vos charmes ; Près de vous naissent les alarmes ; Les plaintes, jamais les dégoûts ; En passant Caton vous encense ; Heureux même par vos rigueurs, Chacun poursuit votre inconstance ; Et, s'il n'obtient pas des faveurs, Il obtient toujours l'espérance.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

Bel arbre, pourquoi conserver Élégie III. Bel arbre, pourquoi conserver Ces deux noms qu'une main trop chère Sur ton écorce solitaire Voulut elle-même graver ? Ne parle plus d'Eléonore ; Rejette ces chiffres menteurs : Le temps a désuni les cœurs Que ton écorce unit encore.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

Dieu des amours Élégie IV. Dieu des amours, le plus puissant des dieux, Le seul du moins qu'adora ma jeunesse ; Il m'en souvient, dans ce moment heureux Où je fléchis mon ingrate maîtresse, Mon cœur crédule et trompé par vous deux Mon faible cœur jura d'aimer sans cesse. Mais je révoque un serment indiscret. Assez longtemps tu tourmentas ma vie, Amour, amour, séduisante folie ! Je t'abandonne, et même sans regret. Loin de Paphos la raison me rappelle, Je veux la suivre et ne veux suivre qu'elle. Pour t'obéir je semblais être né : Vers tes autels dès l'enfance entraîné, Je me soumis sans peine à ta puissance. Ton injustice a lassé ma constance : Tu m'as puni de ma fidélité. Ah ! j'aurais dû, moins tendre et plus volage, User des droits accordés au jeune âge. Oui, moins soumis, tu m'aurais mieux traité. Bien insensé celui qui près des belles Perd en soupirs de précieux instants ! Tous les chagrins sont pour les cœurs fidèles ; Tous les plaisirs sont pour les inconstants.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

Dieu vous bénisse Quand je vous dis, Dieu vous bénisse ! Je n'entends pas le créateur, Dont la main féconde et propice Vous donna tout pour mon bonheur ; Encor moins le dieu d'hyménée, Dont l'eau bénite infortunée Change le plaisir en devoir : S'il fait des heureux, l'on peut dire Qu'ils ne sont pas sous son empire, Et qu'il les fait sans le savoir. Mais j'entends ce dieu du bel âge, Qui sans vous serait à Paphos. Or apprenez en peu de mots Comme il bénit, ce dieu volage. Le Désir, dont l'air éveillé Annonce assez l'impatience, Lui présente un bouquet mouillé Dans la fontaine de Jouvence ; Les yeux s'humectent de langueur, Le rouge monte au front des belles, Et l'eau bénite avec douceur Tombe dans l'âme des fidèles. Soyez dévote à ce dieu-là, Vous, qui nous prouvez sa puissance. Eternuez en assurance ; Le tendre Amour vous bénira.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

Du plus malheureux des amants Du plus malheureux des amants Elle avait essuyé les larmes, Sur la foi des nouveaux serments Ma tendresse était sans alarmes ; J'en ai cru son dernier baiser ; Mon aveuglement fut extrême. Qu'il est facile d'abuser L'amant qui s'abuse lui-même ! Des yeux timides et baissés, Une voix naïve et qui touche, Des bras autour du cou passés, Un baiser donné sur la bouche, Tout cela n'est point de l'amour. J'y fus trompé jusqu'à ce jour. Je divinisais les faiblesses ; Et ma sotte crédulité N'osait des plus folles promesses Soupçonner la sincérité ; Je croyais surtout aux caresses. Hélas ! en perdant mon erreur, Je perds le charme de la vie. J'ai partout cherché la candeur, Partout j'ai vu la perfidie. Le dégoût a flétri mon cœur. Je renonce au plaisir trompeur, Je renonce à mon infidèle ; Et, dans ma tristesse mortelle, Je me repens de mon bonheur.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

L'absence Huit jours sont écoulés depuis que dans ces plaines Un devoir importun a retenu mes pas. Croyez à ma douleur, mais ne l'éprouvez pas. Puissiez-vous de l'amour ne point sentir les peines ! Le bonheur m'environne en ce riant séjour. De mes jeunes amis la bruyante allégresse Ne peut un seul moment distraire ma tristesse ; Et mon cœur aux plaisirs est fermé sans retour. Mêlant à leur gaîté ma voix plaintive et tendre, Je demande à la nuit, je redemande au jour Cet objet adoré qui ne peut plus m'entendre. Loin de vous autrefois je supportais l'ennui ; L'espoir me consolait : mon amour aujourd'hui Ne sait plus endurer les plus courtes absences ; Tout ce qui n'est pas vous me devient odieux. Ah ! vous m'avez ôté toutes mes jouissances ; J'ai perdu tous les goûts qui me rendaient heureux. Vous seule me restez, ô mon Éléonore ! Mais vous me suffirez, j'en atteste les dieux ; Et je n'ai rien perdu, si vous m'aimez encore.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

L'infidélité Un bosquet, une jeune femme ; À ses genoux un séducteur Qui jure une éternelle flamme, Et qu'elle écoute sans rigueur ; C'est Valsin. Dans le même asile Justine, crédule et tranquille, Venait rêver a son amant : Elle entre : que le peintre habile Rende ce triple étonnement.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

La nuit Toujours le malheureux t'appelle, Ô Nuit, favorable aux chagrins ! Viens donc, et porte sur ton aile L'oubli des perfides humains. Voile ma douleur solitaire ; Et lorsque la main du Sommeil Fermera ma triste paupière, Ô dieux ! reculez mon réveil ; Qu'à pas lents l'Aurore s'avance Pour ouvrir les portes du jour ; Importuns, gardez le silence, Et laissez dormir mon amour.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

La rechute C'en est fait, j'ai brisé mes chaînes. Amis, je reviens dans vos bras. Les belles ne vous valent pas ; Leurs faveurs coûtent trop de peines. Jouet de leur volage humeur, J'ai rougi de ma dépendance : Je reprends mon indifférence, Et je retrouve le bonheur. Le dieu joufflu de la vendange Va m'inspirer d'autres chansons ; C'est le seul plaisir sans mélange ; Il est de toutes les saisons ; Lui seul nous console et nous venge Des maîtresses que nous perdons. Que dis-je, malheureux ! ah ! qu'il est difficile De feindre la gaîté dans le sein des douleurs ! La bouche sourit mal quand les yeux sont en pleurs. Repoussons loin de nous ce nectar inutile. Et toi, tendre Amitié, plaisir pur et divin, Non, tu ne suffis plus à mon âme égarée, Au cri des passions qui grondent dans mon sein En vain tu veux mêler ta voix douce et sacrée : Tu gémis de mes maux qu'il fallait prévenir ; Tu m'offres ton appui lorsque la chute est faite ; Et tu sondes ma plaie au lieu de la guérir. Va, ne m'apporte plus ta prudence inquiète : Laisse-moi m'étourdir sur la réalité ; Laisse-moi m'enfoncer dans le sein des chimères, Tout courbé sous les fers chanter la liberté, Saisir avec transport des ombres passagères, Et parler de félicité En versant des larmes amères. Ils viendront ces paisibles jours, Ces moments du réveil, où la raison sévère Dans la nuit des erreurs fait briller sa lumière, Et dissipe à nos yeux le songe des Amours. Le Temps, qui d'une aile légère Emporte en se jouant nos goûts et nos penchants, Mettra bientôt le terme à mes égarements. Ô mes amis ! alors échappé de ses chaînes, Et guéri de ses longues peines, Ce cœur qui vous trahit revolera vers vous. Sur votre expérience appuyant ma faiblesse, Peut-être je pourrai d'une folle tendresse Prévenir les retours jaloux, Sur les plaisirs de mon aurore Vous me verrez tourner des yeux mouillés de pleurs, Soupirer malgré moi,rougir de mes erreurs, Et, même en rougissant, les regretter encore.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

Le baiser Ah ! Justine, qu'avez-vous fait ? Quel nouveau trouble et quelle ivresse ! Quoi ! cette extase enchanteresse D'un simple baiser est l'effet ! Le baiser de celui qu'on aime A son attrait et sa douceur ; Mais le prélude du bonheur Peut-il être le bonheur même ? Oui, sans doute, ce baiser là Est le premier, belle Justine ; Sa puissance est toujours divine, Et votre cœur s'en souviendra. Votre ami murmure et s'étonne Qu'il ait sur lui moins de pouvoir : Mais il jouit de ce qu'il donne ; C'est beaucoup plus que recevoir.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

Le bouquet de l'amour Dans ce moment les politesses, Les souhaits vingt fois répétés, Et les ennuyeuses caresses, Pleuvent sans doute à tes côtés. Après ces compliments sans nombre, L'amour fidèle aura son tour : Car dès qu'il verra la nuit sombre Remplacer la clarté du jour, Il s'en ira, sans autre escorte Que le plaisir tendre et discret, Frappant doucement à ta porte, T'offrir ses vœux et son bouquet. Quand l'âge aura blanchi ma tête, Réduit tristement à glaner, J'irai te souhaiter ta fête, Ne pouvant plus te la donner.

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

Le refroidissement Ils ne sont plus ces jours délicieux, Où mon amour respectueux et tendre À votre cœur savait se faire entendre, Où vous m'aimiez, où nous étions heureux. Vous adorer, vous le dire, et vous plaire, Sur vos désirs régler tous mes désirs, C'était mon sort ; j'y bornais mes plaisirs. Aimé de vous, quels vœux pouvais-je faire ? Tout est changé : quand je suis près de vous, Triste et sans voix, vous n'avez rien à dire ; Si quelquefois je tombe à vos genoux, Vous m'arrêtez avec un froid sourire, Et dans vos yeux s'allume le courroux. Il fut un temps, vous l'oubliez peut-être ? Où j'y trouvais cette molle langueur, Ce tendre feu que le désir fait naître, Et qui survit au moment du bonheur. Tout est changé, tout, excepté mon cœur !

en cours de vérification

Evariste de Parny

Evariste de Parny

@evaristeDeParny

Le songe Le sommeil a touché ses yeux ; Sous des pavots délicieux Ils se ferment, et son cœur veille, À l'erreur ses sens sont livrés. Sur son visage, par degrés, La rose devient plus vermeille ; Sa main semble éloigner quelqu'un ; Sur le duvet elle s'agite ; Son sein impatient palpite, Et repousse un voile importun. Enfin, plus calme et plus paisible, Elle retombe mollement ; Et de sa bouche lentement S'échappe un murmure insensible. Ce murmure plein de douceur Ressemble au souffle de Zéphyre, Quand il passe de fleur en fleur ; C'est la volupté qui soupire ; Oui, ce sont les gémissements D'une vierge de quatorze ans, Qui, dans un songe involontaire, Voit une bouche téméraire Effleurer ses appas naissants, Et qui dans ses bras caressants, Presse un époux imaginaire. Le sommeil doit être charmant, Justine, avec un tel mensonge ; Mais plus heureux encor l'amant Qui peut causer un pareil songe !

en cours de vérification