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Corps

63 poésies en cours de vérification
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Poésies de la collection corps

    Aimé Césaire

    Aimé Césaire

    @aimeCesaire

    Corps perdu Moi qui Krakatoa moi qui tout mieux que mousson moi qui poitrine ouverte moi qui laïlape moi qui bêle mieux que cloaque moi qui hors de gamme moi qui Zambèze ou frénétique ou rhombe ou cannibale je voudrais être de plus en plus humble et plus bas toujours plus grave sans vertige ni vestige jusqu'à me perdre tomber dans la vivante semoule d'une terre bien ouverte. Dehors une belle brume au lieu d'atmosphère serait point sale chaque goutte d'eau y faisant un soleil dont le nom le même pour toutes choses serait RENCONTRE BIEN TOTALE si bien que l'on ne saurait plus qui passe ou d'une étoile ou d'un espoir ou d'un pétale de l'arbre flamboyant ou d'une retraite sous-marine courue par les flambeaux des méduses-aurélies Alors la vie j'imagine me baignerait tout entier mieux je la sentirais qui me palpe ou me mord couché je verrais venir à moi les odeurs enfin libres comme des mains secourables qui se feraient passage en moi pour y balancer de longs cheveux plus longs que ce passé que je ne peux atteindre. Choses écartez-vous faites place entre vous place à mon repos qui porte en vague ma terrible crête de racines ancreuses qui cherchent où se prendre Choses je sonde je sonde moi le porte-faix je suis porte racines et je pèse et je force et j'arcane j'omphale Ah qui vers les harpons me ramène je suis très faible je siffle oui je siffle des choses très anciennes de serpents de choses caverneuses Je or vent paix-là et contre mon museau instable et frais pose contre ma face érodée ta froide face de rire défait. Le vent hélas je l'entendrai encore nègre nègre nègre depuis le fond du ciel immémorial un peu moins fort qu'aujourd'hui mais trop fort cependant et ce fou hurlement de chiens et de chevaux qu'il pousse à notre poursuite toujours marronne mais à mon tour dans l'air je me lèverai un cri et si violent que tout entier j'éclabousserai le ciel et par mes branches déchiquetées et par le jet insolent de mon fût blessé et solennel je commanderai aux îles d'exister

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    Alain Bosquet

    Alain Bosquet

    @alainBosquet

    Le corps disperse Le jazz s'enfonce comme un clou jusqu'aux vertèbres. Gardez ce sein, si vous le trouvez beau. Pourquoi, après l'orage, les trottoirs se couvrent-ils de fleurs qui hurlent ? Voulez-vous quelques muqueuses plus fraîches que la soie ? Le disque en s'arrêtant inflige aux garçons verts et aux fillettes bleues un supplice inhumain. Ce soir, au cinéma toutes les lunes sont enceintes. Vous aimez cène aisselle où l'on peut, comme dans un grand port, faire escale et dormir ? Celui qui s'articule, se prive de frissons. Le rock and roll permet de se dissoudre au fond de soi, alcool, naufrage, caresse nue. Si ce bas-ventre vous amuse, empruntez-le jusqu'à demain, poupée gonflable.

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    Alain Bosquet

    Alain Bosquet

    @alainBosquet

    Le corps du verbe Regarde-moi : je ne suis point, mais si j'étais, je serais le poumon du poème. Attends-moi : je n'ai rien résolu ; et le chant de l'absence n'a pas su me dissoudre. Ainsi que le vautour, j'hésite : faudrait-il dévorer l'alphabet ou s'acharner plutôt sur la douce musique qui donne un cœur au verbe, à son insu. Prends-moi pour me prouver enfin que je suis une forme, un besoin de matière, un peu de peau qui souffre. Choisis-moi un destin de texte ou de regard, de consonne ou de chair. J'ai trop de discipline pour me faire Tangage. Aide-moi : sans ivresse, je ne saurais désincarner ce corps trop lourd, ni incarner cette parole où tout est brume.

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    A

    Albert Mérat

    @albertMerat

    Le ventre Appuyé sur les reins et sur les contours blancs Des cuisses, au-dessous des merveilles du buste, Le ventre épanouit sa tension robuste Et joint par une courbe exacte les deux flancs. Les tissus de la peau sont à peine tremblants Du souffle qui descend de la poitrine auguste ; Et leur nubilité sur les hanches s'ajuste Et s'y fond en accords superbes et saillants. Un enveloppement de caresse ou de vague En termine la grâce et dessine un pli vague Des deux côtés, sur la solidité des chairs. Au milieu, sur le fond de blancheur précieuse, Le nombril, conque rose et corolle aux plis clairs, Entrouvre son regard de fleur silencieuse.

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    A

    Albert Mérat

    @albertMerat

    Les bras Ô la plus douce et la meilleure des caresses ! Autour du cou deux bras enlacés simplement. Premier mot du désir, premier rêve d'amant, Et premier abandon de toutes les maîtresses ! Puis vaincus et jetés parmi le flot des tresses Comme le fer tenace arraché de l'aimant ; A l'ombre des rideaux le long apaisement Des suprêmes langueurs et des molles paresses. Et quand, l'âme et les sens rassasiés, l'esprit Clairvoyant vous regarde, il voit et vous décrit Relevés et pareils aux anses d'une amphore ; Du poignet nu sans vain bracelet de métal, Et du coude où le blanc a des rougeurs d'aurore, A l'épaule au parfum plus doux que le santal.

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    A

    Albert Mérat

    @albertMerat

    Les corps Les Grecs, pour honorer une de leurs Vénus, Inscrivaient Callipyge au socle de la pierre. Ils aimaient, par amour de la grande matière, La vérité des corps harmonieux et nus. Je ne crois pas aux sots faussement ingénus A qui l'éclat du beau fait baisser la paupière ; Je veux voir et nommer la forme tout entière Qui n'a point de détails honteux ou mal venus. C'est pourquoi je vous loue, ô blancheurs, ô merveilles, A ces autres beautés égales et pareilles Que l'art même, hésitant, tremble de composer ; Superbes dans le cadre indigne de la chambre, L'amoureuse nature a, d'un divin baiser, Sur votre neige aussi mis deux fossettes d'ambre.

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    A

    Albert Mérat

    @albertMerat

    Les mains Blanches, ayant la chair délicate des fleurs, On ne peut pas savoir que les mains sont cruelles. Pourtant l'âme se sèche et se flétrit par elles ; Elles touchent nos yeux pour en tirer des pleurs. Le lait pur et la nacre ont formé leurs couleurs ; Un peu de rose fait qu'elles semblent plus belles. Les veines, réseau fin de bleuâtres dentelles, En viennent affleurer les plastiques pâleurs. Si frêles ! qui pourrait redouter leurs caresses ? Les mains, filets d'amour que tendent les maîtresses, Prennent notre pensée et prennent notre cœur. Leur claire beauté ment et leurs chaînes sont sûres ; Et ma fierté subit, ainsi qu'un mal vainqueur, Les mains, les douces mains qui nous font des blessures.

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    A

    Albert Mérat

    @albertMerat

    Les seins L'éclosion superbe et jeune de ses seins Pour enchaîner mes yeux fleurit sur sa poitrine. Tels deux astres jumeaux dans la clarté marine Palpitent dévolus aux suprêmes desseins. Vous contenez l'esprit loin des rêves malsains, Nobles rondeurs, effroi de la pudeur chagrine ! Et c'est d'un trait pieux que mon doigt vous burine, Lumineuses parmi la pourpre des coussins. Blanches sérénités de l'océan des formes, Quelquefois je vous veux, sous les muscles énormes, Géantes et crevant le moule de mes mains. Plus frêles, mesurant l'étreinte de ma lèvre, Vers la succession des muets lendemains, Conduisez lentement mon extase sans fièvre.

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    A

    Albert Mérat

    @albertMerat

    Les épaules La courbe n'eut jamais d'inflexions plus douces, Excepté quand elle est le sein pur et charmant. Elles laissent tomber leurs ondes mollement Dans la succession des lignes sans secousses. Une ombre d'or que font des duvets et des mousses ! A l'aisselle en finit l'épanouissement ; Et les songes légers qui viennent en aimant Sur elles vont dormir au bord des tresses rousses. Opulentes, sans rien qui sente la maigreur, Elles ont, n'étant pas sujettes à l'erreur, L'impeccabilité de marbre des déesses. Nul voisinage exquis n'est pour elles gênant ! Elles n'ont pas besoin de faire des promesses. Car elles sont un tout suprême et rayonnant.

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    Albert Samain

    Albert Samain

    @albertSamain

    Myrtil et Palémone Myrtil et Palémone, enfants chers aux bergers, Se poursuivent dans l'herbe épaisse des vergers, Et font fuir devant eux, en de bruyantes joies, La file solennelle et stupide des oies. Or Myrtil a vaincu Palémone en ses jeux ; Comme il l'étreint, rieuse, entre ses bras fougueux, Il frémit de sentir, sous les toiles légères ; Palpiter tout à coup des formes étrangères ; Et la double rondeur naissante des seins nus Jaillit comme un beau fruit sous ses doigts ingénus. Le jeu cesse... Un mystère en son cœur vient d'éclore, Et, grave, il les caresse et les caresse encore.

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    Albert Samain

    Albert Samain

    @albertSamain

    Rhodante Dans l'après midi chaude où dorment les oiseaux Au fond de l'antre empli d'un clair murmure d'eaux Rhodante, nue, a fui les champs où luit la flamme ; Et sa ceinture gît sur ses voiles de femme. Rhodante est fine et chaude avec des flancs légers ; Le fruit brun de son corps fait languir les bergers. Dans son sang orageux comme un soir de vendanges Elle roule une flamme et des fièvres étranges. Et ses petits seins d'ambre ont des bouts violets... Oh ! ses lourds cheveux noirs et ses rouges œillets ! Un rayon d'or tombé dans l'ombreuse retraite, A glissé dans sa chair une langueur secrète ; Tout son corps amoureux s'allonge de désir. Ses bras tordus en vain, las d'étreindre le vide, Retombent ; des sanglots pressent son cœur rapide. Par l'attente d'un dieu ses traits semblent frappés ; Elle arrache de l'herbe avec ses doigts crispés Et soudain se soulève à demi, pâle et sombre... Et les yeux d'or du faune ont pétillé dans l'ombre.

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    Albert Samain

    Albert Samain

    @albertSamain

    Xanthis Au vent frais du matin frissonne l'herbe fine ; Une vapeur légère aux flancs de la colline Flotte ; et dans les taillis d'arbre en arbre croisés Brillent, encore intacts, de longs fils irisés. Près d'une onde ridée aux brises matinales, Xanthis, ayant quitté sa robe et ses sandales, D'un bras s'appuie au tronc flexible d'un bouleau, Et, penchée à demi, se regarde dans l'eau. Le flot de ses cheveux d'un seul côté s'épanche, Et, blanche, elle sourit à son image blanche... Elle admire sa taille droite, ses beaux bras, Et sa hanche polie, et ses seins délicats, Et d'une main, que guide une exquise décence, Fait un voile pudique à sa jeune innocence. Mais un grand cri soudain retentit dans les bois, Et Xanthis tremble ainsi que la biche aux abois, Car elle a vu surgir, dans l'onde trop fidèle, Les cornes du méchant satyre amoureux d'elle.

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    Alfred De Musset

    Alfred De Musset

    @alfredDeMusset

    Qu’elle est superbe en son désordre Avez-vous vu, dans Barcelone, Une Andalouse au sein bruni ? Pâle comme un beau soir d’automne ! C’est ma maîtresse, ma lionne ! La marquesa d’Amaëgui ! J’ai fait bien des chansons pour elle, Je me suis battu bien souvent. Bien souvent j’ai fait sentinelle, Pour voir le coin de sa prunelle, Quand son rideau tremblait au vent. Elle est à moi, moi seul au monde. Ses grands sourcils noirs sont à moi, Son corps souple et sa jambe ronde, Sa chevelure qui l’inonde, Plus longue qu’un manteau de roi ! C’est à moi son beau corps qui penche Quand elle dort dans son boudoir, Et sa basquina sur sa hanche, Son bras dans sa mitaine blanche, Son pied dans son brodequin noir.

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    Alfred de Vigny

    Alfred de Vigny

    @alfredDeVigny

    A M. le Comte de Moncorps Vous aimez, cher ami, les vers à la douzaine {Douzaine, par respect, car j'aurais dit centaine, En ne faisant parler que mon juste courroux). Eh quoi! ces vers, Moncorps, vous en contentez-vous ? Je vous en fais ici, mais puisse cet exemple Vous montrer la raison, vous mener à son temple, Vous y loger s'il peut, malgré l'aversion Que vous semblez avoir pour l'habitation. Ces vers sans harmonie, et ces rimes blessées *, Ces discours sans liens, ces petites pensées Ont donc pu vous séduire ! O que je crois d'esprit A celui qui vous fit goûter un tel écrit! Qu'il fallait que sa voix flexible, harmonieuse, Trompât avec douceur votre oreille trompeuse, Pour que de tous ces riens vous fussiez enchanté. Jamais je ne vous vis d'un tel zèle emporté; J'admirais vos yeux bleus et vos vives prunelles D'où jaillissait la joie en vives étincelles, Et vos gestes fréquents et votre teint rougi — Teint sur lequel des vers l'amour avait agi ! Quelle honte, grand dieu ! Cette divine flamme, Ces petits vers ont pu l'arracher à votre âme ? Non, je n'y veux pas croire, et j'aime mieux penser Que votre tendre cœur s'était senti blesser Par des verres meilleurs, pleins du jus d'une vigne Que je préférerais même aux vers de Lavigne, Ou bien par les beaux yeux de quelque aimable objet, Ou bien par le courroux de quelque vain projet. Laissez-moi cette erreur, elle m'est nécessaire Tant j'ai besoin pour vous d'estime bien entière, Et même en poésie, hélas ! si vous saviez A quels dédains cruels vous vous exposeriez Si votre opinion de la sorte égarée D'auteurs un peu connus se trouvait entourée ! Ce rire dédaigneux, farouche et sans pitié Que ne tempère pas l'indulgente amitié, Viendrait vous interdire, ou le triste silence, Plus dur que les éclats, armerait leur vengeance; Ou si l'un d'eux, plus doux, sachant vous distinguer Voulait sur votre auteur un peu vous haranguer, Il vous dirait : « Monsieur, sachez de moi la haine Que nous professons tous pour les vers faits sans peine; Le vers le plus obscur d'un auteur sérieux A plus de vrai mérite et vaut plus à nos yeux Que l'inutile amas de légères paroles Qui forme le tissu de ces œuvres frivoles Qui, sans rien peindre au cœur, cherche à nous éblouir, Qu'on dit vers fugitifs parce qu'ils sont à fuir. » Adieu, Moncorps, soyez à ce discours sensible, Moi, je vais déjeuner et puis lire la Bible.

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    Alfred de Vigny

    Alfred de Vigny

    @alfredDeVigny

    La colère de samson Le désert est muet, la tente est solitaire. Quel pasteur courageux la dressa sur la terre Du sable et des lions ? — La nuit n’a pas calmé La fournaise du jour dont l’air est enflammé. Un vent léger s’élève à l’horizon et ride Les flots de la poussière ainsi qu’un lac limpide. Le lin blanc de la tente est bercé mollement ; L’œuf d’autruche, allumé, veille paisiblement, Des voyageurs voilés intérieure étoile, Et jette longuement deux ombres sur la toile. L’une est grande et superbe, et l’autre est à ses pieds : C’est Dalila, l’esclave, et ses bras sont liés Aux genoux réunis du maître jeune et grave Dont la force divine obéit à l’esclave. Comme un doux léopard elle est souple et répand Ses cheveux dénoués aux pieds de son amant. Ses grands yeux, entr’ouverts comme s’ouvre l’amande, Sont brûlants du plaisir que son regard demande, Et jettent, par éclats, leurs mobiles lueurs. Ses bras fins tout mouillés de tièdes sueurs, Ses pieds voluptueux qui sont croisés sous elle, Ses flancs, plus élancés que ceux de la gazelle, Pressés de bracelets, d’anneaux, de boucles d’or, Sont bruns, et, comme il sied aux filles de Hatsor, Ses deux seins, tout chargés d’amulettes anciennes, Sont chastement pressés d’étoffes syriennes. Les genoux de Samson fortement sont unis Comme les deux genoux du colosse Anubis. Elle s’endort sans force et riante et bercée Par la puissante main sous sa tête placée. Lui, murmure le chant funèbre et douloureux Prononcé dans la gorge avec des mots hébreux. Elle ne comprend pas la parole étrangère, Mais le chant verse un somme en sa tête légère. « Une lutte éternelle en tout temps, en tout lieu, Se livre sur la terre, en présence de Dieu, Entre la bonté d’Homme et la ruse de Femme. Car la Femme est un être impur de corps et d’âme. L’Homme a toujours besoin de caresse et d’amour, Sa mère l’en abreuve alors qu’il vient au jour, Et ce bras le premier l’engourdit, le balance Et lui donne un désir d’amour et d’indolence. Troublé dans l’action, troublé dans le dessein, Il rêvera partout à la chaleur du sein, Aux chansons de la nuit, aux baisers de l’aurore, À la lèvre de feu que sa lèvre dévore, Aux cheveux dénoués qui roulent sur son front, Et les regrets du lit, en marchant, le suivront. Il ira dans la ville, et, là, les vierges folles Le prendront dans leurs lacs aux premières paroles. Plus fort il sera né, mieux il sera vaincu, Car plus le fleuve est grand et plus il est ému. Quand le combat que Dieu fit pour la créature Et contre son semblable et contre la nature Force l’Homme à chercher un sein où reposer, Quand ses yeux sont en pleurs, il lui faut un baiser. Mais il n’a pas encor fini toute sa tâche. Vient un autre combat plus secret, traître et lâche ; Sous son bras, sous son cœur se livre celui-là, Et, plus ou moins, la Femme est toujours Dalila. Elle rit et triomphe, en sa froideur savante, Au milieu de ses sœurs elle attend et se vante De ne rien éprouver des atteintes du feu. À sa plus belle amie elle en a fait l’aveu : « Elle se fait aimer sans aimer elle-même ; « Un Maître lui fait peur. C’est le plaisir qu’elle aime, « L’Homme est rude et le prend sans savoir le donner. « Un sacrifice illustre et fait pour étonner « Rehausse mieux que l’or, aux yeux de ses pareilles, « La beauté qui produit tant d’étranges merveilles « Et d’un sang précieux sait arroser ses pas. » — Donc ce que j’ai voulu, Seigneur, n’existe pas ! — Celle à qui va l’amour et de qui vient la vie, Celle-là, par orgueil, se fait notre ennemie. La Femme est, à présent, pire que dans ces temps Où, voyant les humains, Dieu dit : « Je me repens ! » Bientôt, se retirant dans un hideux royaume, La Femme aura Gomorrhe et l’Homme aura Sodome ; Et se jetant, de loin, un regard irrité, Les deux sexes mourront chacun de son côté. Éternel ! Dieu des forts ! vous savez que mon âme N’avait pour aliment que l’amour d’une femme, Puisant dans l’amour seul plus de sainte vigueur Que mes cheveux divins n’en donnaient à mon cœur. — Jugez-nous. — La voilà sur mes pieds endormie. Trois fois elle a vendu mes secrets et ma vie, Et trois fois a versé des pleurs fallacieux Qui n’ont pu me cacher la rage de ses yeux ; Honteuse qu’elle était, plus encor qu’étonnée, De se voir découverte ensemble et pardonnée ; Car la bonté de l’Homme est forte, et sa douceur Écrase, en l’absolvant, l’être faible et menteur. Mais enfin je suis las. J’ai l’âme si pesante, Que mon corps gigantesque et ma tête puissante Qui soutiennent le poids des colonnes d’airain Ne la peuvent porter avec tout son chagrin. Toujours voir serpenter la vipère dorée Qui se traîne en sa fange et s’y croit ignorée ; Toujours ce compagnon dont le cœur n’est pas sûr, La Femme, enfant malade et douze fois impur ! Toujours mettre sa force à garder sa colère Dans son cœur offensé, comme en un sanctuaire D’où le feu s’échappant irait tout dévorer. Interdire à ses yeux de voir ou de pleurer, C’est trop ! Dieu, s’il le veut, peut balayer ma cendre. J’ai donné mon secret, Dalila va le vendre. Qu’ils seront beaux, les pieds de celui qui viendra Pour m’annoncer la mort ! — Ce qui sera, sera ! » Il dit et s’endormit près d’elle jusqu’à l’heure Où les guerriers tremblants d’être dans sa demeure, Payant au poids de l’or chacun de ses cheveux, Attachèrent ses mains et brûlèrent ses yeux, Le traînèrent sanglant et chargé d’une chaîne Que douze grands taureaux ne tiraient qu’avec peine, La placèrent debout, silencieusement, Devant Dagon, leur Dieu, qui gémit sourdement Et deux fois, en tournant, recula sur sa base Et fit pâlir deux fois ses prêtres en extase ; Allumèrent l’encens ; dressèrent un festin Dont le bruit s’entendait du mont le plus lointain ; Et près de la génisse aux pieds du Dieu tuée Placèrent Dalila, pâle prostituée, Couronnée, adorée et reine du repas, Mais tremblante et disant : Il ne me verra pas ! – Terre et ciel ! avez-vous tressailli d’allégresse Lorsque vous avez vu la menteuse maîtresse Suivie d’un œil hagard les yeux tachés de sang Qui cherchaient le soleil d’un regard impuissant ? Et quand enfin Samson, secouant les colonnes Qui faisaient le soutien des immenses Pylônes, Écrasa d’un seul coup, sous les débris mortels, Ses trois mille ennemis, leurs dieux et leurs autels ? Terre et Ciel ! punissez par de telles justices La trahison ourdie en des amours factices, Et la délation du secret de nos cœurs Arraché dans nos bras par des baisers menteurs ! Écrit à Shavington (Angleterre), 7 avril 1839.

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    C

    Catulle Mendès

    @catulleMendes

    Reste. N’allume pas la lampe Reste. N'allume pas la lampe. Que nos yeux S'emplissent pour longtemps de ténèbres, et laisse Tes bruns cheveux verser la pesante mollesse De leurs ondes sur nos baisers silencieux.

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    La chevelure Ô toison, moutonnant jusque sur l’encolure ! Ô boucles ! Ô parfum chargé de nonchaloir ! Extase ! Pour peupler ce soir l’alcôve obscure Des souvenirs dormant dans cette chevelure, Je la veux agiter dans l’air comme un mouchoir ! La langoureuse Asie et la brûlante Afrique, Tout un monde lointain, absent, presque défunt, Vit dans tes profondeurs, forêt aromatique ! Comme d’autres esprits voguent sur la musique, Le mien, ô mon amour ! nage sur ton parfum. J’irai là-bas où l’arbre et l’homme, pleins de sève, Se pâment longuement sous l’ardeur des climats ; Fortes tresses, soyez la houle qui m’enlève ! Tu contiens, mer d’ébène, un éblouissant rêve De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts : Un port retentissant où mon âme peut boire A grands flots le parfum, le son et la couleur ; Où les vaisseaux, glissant dans l’or et dans la moire, Ouvrent leurs vastes bras pour embrasser la gloire D’un ciel pur où frémit l’éternelle chaleur. Je plongerai ma tête amoureuse d’ivresse Dans ce noir océan où l’autre est enfermé ; Et mon esprit subtil que le roulis caresse Saura vous retrouver, ô féconde paresse, Infinis bercements du loisir embaumé ! Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues, Vous me rendez l’azur du ciel immense et rond ; Sur les bords duvetés de vos mèches tordues Je m’enivre ardemment des senteurs confondues De l’huile de coco, du musc et du goudron. Longtemps ! toujours ! ma main dans ta crinière lourde Sèmera le rubis, la perle et le saphir, Afin qu’à mon désir tu ne sois jamais sourde ! N’es-tu pas l’oasis où je rêve, et la gourde Où je hume à longs traits le vin du souvenir ?

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Le portrait La Maladie et la Mort font des cendres De tout le feu qui pour nous flamboya. De ces grands yeux si fervents et si tendres, De cette bouche où mon cœur se noya, De ces baisers puissants comme un dictame, De ces transports plus vifs que des rayons, Que reste-t-il ? C'est affreux, ô mon âme ! Rien qu'un dessin fort pâle, aux trois crayons,

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Parfum exotique Quand, les deux yeux fermés, en un soir chaud d'automne, Je respire l'odeur de ton sein chaleureux, Je vois se dérouler des rivages heureux Qu'éblouissent les feux d'un soleil monotone ; Une île paresseuse où la nature donne Des arbres singuliers et des fruits savoureux ; Des hommes dont le corps est mince et vigoureux, Et des femmes dont l'œil par sa franchise étonne.

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    Charles Baudelaire

    Charles Baudelaire

    @charlesBaudelaire

    Une martyre Au milieu des flacons, des étoffes lamées Et des meubles voluptueux, Des marbres, des tableaux, des robes parfumées Qui traînent à plis somptueux, Dans une chambre tiède où, comme en une serre, L'air est dangereux et fatal, Où des bouquets mourants dans leurs cercueils de verre Exhalent leur soupir final,

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    Charles Peguy

    Charles Peguy

    @charlesPeguy

    Quatrains Cœur dur comme une tour, Ô cœur de pierre, Donjon de jour en jour Vêtu de lierre. De tous liens lié A cette terre, Ô cœur humilié, Cœur solitaire. Cœur qui as tant crevé De pleurs secrets, Buveur inabreuvé, Cendre et regrets. Cœur tant de fois baigné Dans la lumière, Et tant de fois noyé Source première. Ô cœur laissé pour mort Dans le fossé, Cœur tu battais encore, Ô trépassé. Ô cœur inexploré, Vaste univers, Idole décorée, Jardin d'hiver.

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    F

    Flora Tahavi

    @floraTahavi

    Ciel face a face Ciel face a face mon asile ces bras d'air de l'île ces mains de moire de lin bleu caraco de la mémoire même noire ces soirs cendres sales d'aubes pulvérisées le ciel sale avili souillé loin des menthes l'ampoule démente de n'avoir plus d'ombre quand l'aimant sordidement impose aux mains l'hommasse raison des yeux crevés les vœux grévés veules dans l'éternité des fixateurs c'est la chaux vive d'un voile de ciel baisant lentement l'écorchure et le baiser le baiser de la gouge dans l'enfance des lignes le reflet du fait du surfait le reflet du méfait défait contrefait le reflet est la seule fait du fait son beau poème d'impureté le reflet décolle tout se rit des cadenas et de la chitine morte des colles il simule s'immole par le feu se rit du blanc atroce reflet albatros aux yeux lavés dans l'ombre reflet mère du feu

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    F

    Flora Tahavi

    @floraTahavi

    Demie insomnie Le récit hâtif dans l'erre de l'air frais de la patinoire récitative l'aube comme un baiser indéfiniment supplié suppliciées les mains sont tentées par la pierre et la chaux lent lien compositions à l'émeri rictus blanc de l'insomnie large lieu et atroce tête dense du clou dans le gaïac de la tête la fixation véreuse cireuse et l'amble ombreuse l'omble douce et muette les noms suspendus flottants et des fragments d'images marines brûlées dans les organes des cirons omniprésents et amoureux l'âtre aussi l'âtre froid d'une aurore où le regret des yeux verse goutte à goutte le chai infecté du miel mort ciel grand ouvert décousu ciel noir clair où puisent les cils gommages fréquents puis puissamment gracieux l'envol la fuite entêtée des petites filles du feu quelque part comme un départ une histoire peu à peu maltée dans la bouilloire des rêveries du jour une histoire infusant mamajuana dans les nuées et la laine vierge alors en vrac délicieux des clignotements hagards et timides de phares de fard sous le plâtre des pudeurs de braise tenaces frêles une femme appareille.

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    F

    Flora Tahavi

    @floraTahavi

    La vie dans les A La vie dans les A Pour Lou sayonara aran niagarafalls naga nara raga aras à poils ras à voir tard apaP happax ahahahahahhahhhahhhahhhahha anti A mama rama par paala pasalina amât mât canada sahara tarama amas âme ah ma là où ? na wah hi ! Rata d'zoeufs Nisha Natalia Nawar

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    Germain Nouveau

    Germain Nouveau

    @germainNouveau

    Le corps et l'âme Dieu fit votre corps noble et votre âme charmante. Le corps sort de la terre et l'âme aspire aux cieux ; L'un est un amoureux et l'autre est une amante. Dans la paix d'un jardin vaste et délicieux, Dieu souffla dans un peu de boue un peu de flamme, Et le corps s'en alla sur ses pieds gracieux. Et ce souffle enchantait le corps, et c'était l'âme Qui, mêlée à l'amour des bêtes et des bois, Chez l'homme adorait Dieu que contemplait la femme. L'âme rit dans les yeux et vole avec la voix, Et l'âme ne meurt pas, mais le corps ressuscite, Sortant du limon noir une seconde fois. Dieu fit suave et beau votre corps immortel : Les jambes sont les deux colonnes de ce temple, Les genoux sont la chaise et le buste est l'autel. Et la ligne du torse, à son sommet plus ample, Comme aux flancs purs de vase antique, rêve et court Dans l'ordre harmonieux dont la lyre est l'exemple. Pendant qu'un hymne à Dieu, dans un battement court, Comme au coeur de la lyre une éternelle phrase, Chante aux cordes du coeur mélodieux et sourd. Des épaules, planant comme les bords du vase, La tête émerge, et c'est une adorable fleur Noyée en une longue et lumineuse extase. Si l'âme est un oiseau, le corps est l'oiseleur. Le regard brûle au fond des yeux qui sont des lampes Où chaque larme douce est l'huile de douleur. La mesure du temps tinte aux cloisons des tempes ; Et les bras longs aux mains montant au firmament Ont charitablement la sûreté des rampes. Le coeur s'embrase et fond dans leur embrasement, Comme sous les pressoirs fond le fruit de la vigne, Et sur les bras croisés vit le recueillement. Ni les béliers frisés ni les plumes de cygne, Ni la crinière en feu des crieurs de la faim N'effacent ta splendeur, ô chevelure insigne, Faite avec l'azur noir de la nuit, ou l'or fin De l'aurore, et sur qui nage un parfum farouche, Où la femme endort l'homme en une mer sans fin. Rossignol vif et clair, grave et sonore mouche Frémis ou chante au bord des lèvres, douce voix ! Douce gloire du rire, épanouis la bouche ! Chaque chose du corps est soumise à tes lois, Dieu grand, qui fais tourner la terre sous ton geste, Dans la succession régulière des mois. Tes lois sont la santé de ce compagnon leste De l'âme, ainsi qu'un rythme est l'amour de ses pas, Mais l'âme solitaire est joyeuse où Dieu reste. La souffrance du corps s'éteint dans le trépas, Mais la douleur de l'âme est l'océan sans borne ; Et ce sont deux présents que l'on estime pas. Oh ! ne négligez pas votre âme ! L'âme est morne Que l'on néglige, et va s'effaçant, comme au jour Qui monte le croissant voit s'effacer sa corne. Et le corps, pour lequel l'âme n'a pas d'amour, Dans la laideur, que Dieu condamne, s'étiole, Comme un fou relégué dans le fond d'une cour. La grâce de votre âme éclôt dans la parole, Et l'autre dans le geste, aimant les frais essors, Au vêtement léger comme une âme qui vole. Sachez aimer votre âme en aimant votre corps, Cherchez l'eau musicale aux bains de marbre pâle, Et l'onde du génie au coeur des hommes forts. Mêlez vos membres lourds de fatigue, où le hâle De la vie imprima son baiser furieux, Au gémissement frais que la Naïade exhale ; Afin qu'au jour prochain votre corps glorieux, Plus léger que celui des Mercures fidèles, Monte à travers l'azur du ciel victorieux. Dans l'onde du génie, aux sources sûres d'elles, Plongez votre âme à nu, comme les bons nageurs, Pour qu'elle en sorte avec la foi donneuse d'ailes ! Dans la nuit, vers une aube aux divines rougeurs, Marchez par le sentier de la bonne habitude, Soyez de patients et graves voyageurs. Que cette jeune soeur charmante de l'étude Et du travail tranquille et gai, la Chasteté, Parfume vos discours et votre solitude. La pâture de l'âme est toute vérité ; Le corps, content de peu, cueille une nourriture Dans le baiser mystique où règne la beauté. Puisque Dieu répandit l'homme dans la nature, Sachez l'aimer en vous, et d'abord soyez doux A vous-mêmes, et doux à toute créature. Si vous ne vous aimez en Dieu, vous aimez-vous ?

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    Germain Nouveau

    Germain Nouveau

    @germainNouveau

    Les baisers Sonnez, sonnez haut sur la joue, Baisers de la franche amitié, Comme un fils de neuf ans qui joue, Petit tapageur sans pitié. Baiser du respect qui s'imprime À la porte du cœur humain, Comme avec l'aile d'une rime, Effleurez à peine la main ; Baiser d'affection armée, De la mère au cœur noble et fier Sur le front de la tête aimée, Vibrez mieux que le bruit du fer. Baiser d'affection aînée, Ou de mère, le jour des prix, Sur chaque tête couronnée Laissez-vous tomber, sans mépris. Baisers d'affections voisines, Voltigez du rire joyeux Des sœurs ou des jeunes cousines Sur le nez, la bouche ou les yeux ; Baiser plus doux que des paroles, Baiser des communes douleurs, Ferme en soupirant les corolles Des yeux d'où s'échappent les pleurs : Baiser de la passion folle Baise la trace de ses pas, Réellement, sans hyperbole, Pour montrer que tu ne mens pas. Baise un bas ourlet de sa robe, L'éventail quitté par ses doigts, Et si tout objet se dérobe, Feins dans l'air de baiser sa voix ; Et si l'on garde le silence, Tu dois t'en aller, c'est plus sûr ; Mais avant ton aile s'élance Et tu t'appliques sur son mur. Reviens plus joyeux que la veille, Mouille son ongle musical, Les bords riants de son oreille. Que le monde te soit égal ! Baiser du désir qui veut mordre, Pose-toi derrière le cou, Dans la nuque où l'on voit se tordre Une mèche qui te rend fou. Sur sa bouche et sur sa promesse, Profond et pur comme le jour, Plus long qu'un prêtre à la grand messe, Oubliez-vous, Baiser d'amour.

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    G

    Ghérasim Luca

    @gherasimLuca

    L'écho du corps Prête-moi ta cervelle cède-moi ton cerceau ta cédille ta certitude cette cerise cède-moi cette cerise ou à peu près une autre cerne-moi de tes cernes précipite-toi dans le centre de mon être sois le cercle de ce centre le triangle de ce cercle la quadrature de mes ongles sois ceci ou cela ou à peu près un autre mais suis-moi précède-moi séduction entre la nuit de ton.nu et le jour de tes joues entre la vie de ton visage et la pie de tes pieds entre le temps de tes tempes et l'espace de ton esprit entre la fronde de ton front et les pierres de tes paupières entre le bas de tes bras et le haut de tes os entre le do de ton dos et le la de ta langue entre les raies de ta rétine et le riz de ton iris entre le thé de ta tête et les verres de tes vertèbres entre le vent de ton ventre et les nuages de ton nu entre le nu de ta nuque et la vue de ta vulve entre la scie de tes cils et le bois de tes doigts • entre le bout de tes doigts et le bout de ta bouche entre le pois de tes poils et la poix de ta poitrine entre le point de tes poings et la ligne de tes ligaments entre les pôles de tes épaules et le sud-est de ta sueur entre le cou de tes coudes et le coucou de ton cou entre le nez de tes nerfs et les fées de tes fesses entre l'air de ta chair et les lames de ton âme entre l'eau de ta peau et le seau de tes os entre la terre de tes artères et le feu de ton souffle entre le seing de tes seins et les seins de tes mains entre les villes de ta cheville et la nacelle de tes aisselles entre la source de tes sourcils et le but de ton buste entre le musc de tes muscles et le nard de tes narines entre la muse de tes muscles et la méduse de ton médius entre le manteau de ton menton et le tulle de ta rotule entre le tain de ton talon et le ton de ton menton entre l'œil de ta taille et les dents de ton sang entre la pulpe de ta pupille et la serre de tes cernes entre les oreilles de tes orteils et le cervelet de ton cerveau entre l'oreiller de tes oreilles et la taie de ta tête entre le lévrier de tes lèvres et le poids de tes poignets entre les frontières de ton front et le visa de ton visage entre le pouls de tes poumons et le pouls de ton pouce entre le lait de tes mollets et le pot de ta paume entre les pommes de tes pommettes et le plat de tes omoplates entre les plantes de tes plantes et le palais de ton palais entre les roues de tes joues et les lombes de tes jambes entre le moi de ta voix et la soie de tes doigts entre le han de tes hanches et le halo de ton haleine entre la haine de ton aine et les aines de tes veines entre les cuisses de tes caresses et l'odeur de ton cœur entre le génie de tes genoux et le nom du nombre du nombril de ton ombre

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    Guillaume Apollinaire

    Guillaume Apollinaire

    @guillaumeApollinaire

    Marie Vous y dansiez petite fille Y danserez-vous mère-grand C’est la maclotte qui sautille Toutes les cloches sonneront Quand donc reviendrez-vous Marie Les masques sont silencieux Et la musique est si lointaine Qu’elle semble venir des cieux Oui je veux vous aimer mais vous aimer à peine Et mon mal est délicieux Les brebis s’en vont dans la neige Flocons de laine et ceux d’argent Des soldats passent et que n’ai-je Un cœur à moi ce cœur changeant Changeant et puis encor que sais-je

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    Henri De Régnier

    Henri De Régnier

    @henriDeRegnier

    Odelette - Si j'ai parlé Si j'ai parlé De mon amour, c'est à l'eau lente Qui m'écoute quand je me penche Sur elle ; si j'ai parlé De mon amour, c'est au vent Qui rit et chuchote entre les branches ; Si j'ai parlé de mon amour, c'est à l'oiseau Qui passe et chante Avec le vent ; Si j'ai parlé C'est à l'écho, Si j'ai aimé de grand amour, Triste ou joyeux, Ce sont tes yeux ; Si j'ai aimé de grand amour, Ce fut ta bouche grave et douce, Ce fut ta bouche ; Si j'ai aimé de grand amour, Ce furent ta chair tiède et tes mains fraiches, Et c'est ton ombre que je cherche.

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    H

    Henri Michaux

    @henriMichaux

    En circulant dans mon corps En ce temps-là, la peur que je ne connaissais plus depuis dix ans, la peur à nouveau me commanda. D'un mal sourd d'abord, mais qui, quand il vient enfin, vient comme l'éclair, comme le souffle qui désagrège les édifices, la peur m'occupa. Ma peur songeant à ma main qui dans un avenir proche devait se figer, cet avenir à l'instant fut; et ma main se figea, ne pouvant plus retenir un objet. Ma peur pensant la nécrose des extrémités, aussitôt mes pieds se glacèrent et, la vie les quittant, se trouvèrent comme tronçonnées de mon corps. Un barrage catégorique m'en tenait désormais éloigné. Déjà j'abandonnais ces mottes qui seulement pour peu de temps encore devaient s'appeler mes pieds, me promettant des douleurs terribles, avant de s'en aller, et après, étant partis... Ma peur ensuite allant à ma tête, en moins de deux, un mal fulgurant me sabra le crâne et s'en suivit une défaillance telle que j'eusse reculé devant l'effort pour retrouver mon nom. Ainsi je circulais en angoisse dans mon corps affolé, excitant des chocs, des arrêts, des plaintes. J'éveillai les reins, et ils eurent mal. Je réveillai le colon, il pinça; le cœur, il dégaina. Je me dévêtais la nuit, et dans les tremblements j'inspectais ma peau, dans l'attente du mal qui allait la crever. Un chatouillement froid m'alertait tantôt ici, tantôt là, un chatouillement froid à toutes les zones de moi. La guerre venait de finir et je cessais de me remparer, quand la peur qui n'attend qu'un soulagement pour paraître, la peur entra en moi en tempête et dès lors ma guerre commença.

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